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Rayonnement Cosmique et Matière Noire

par Francois Legrand - 1er octobre 2019


Quelle est l’origine du rayonnement cosmique de très haute énergie ? Quelle est sa composition ? Comment se propage-t-il ? Issus de phénomènes violents, les rayons cosmiques et les rayons gamma de très haute énergie offrent une fenêtre d’exploration de l’Univers à des énergies qui ne pourront jamais être étudiées par les accélérateurs de particules. De grands observatoires sont réalisés pour répondre au défi que représente le flux très faible de ces messagers. Aujourd’hui l’observatoire Auger en Argentine et le réseau de télescopes HESS installe en Namibie délivrent des données qui permettent de repousser les frontières en énergie et en sensibilité.

Quand Victor Hess mit en évidence le rayonnement cosmique il y a plus de 100 ans, il n’imaginait pas la richesse des sujets scientifiques qui allaient se développer dans ce domaine. Aujourd’hui encore, de nombreuses questions restent ouvertes. Quelle est l’origine des rayons cosmiques – où et comment les particules sont produites ? Quels sont les processus d’accélération et de diffusion qu’elles subissent lors de leur propagation ? Quelle est la composition du rayonnement cosmique ? En plus d’apporter des réponses à ces questions, l’observation du rayonnement cosmique pourrait fournir un jour une réponse au problème de la matière « noire » dont les effets gravitationnels sont perceptibles, mais dont la nature reste une énigme.
Au LPNHE, les sujets de physique abordés avec les rayons cosmiques sont à la fois liés à l’astrophysique (émission et propagation), à la physique fondamentale (brisure des symétries en lien avec les modèles de Gravité Quantique) et à la cosmologie (détection de la matière noire). Depuis de nombreuses années, le laboratoire a des contributions importantes aux expériences H.E.S.S., Auger ainsi qu’à la préparation de CTA. Alors qu’une part des activités du groupe H.E.S.S. concerne la recherche indirecte de matière noire, le laboratoire a rejoint en 2016 les projets de recherche directe de matière noire XENON, DarkSide et DAMIC.
Les rayons cosmiques sont d’origine galactique ou extra-galactique. Jusqu’à présent, tout indique que ce sont des particules du modèle standard de la physique des parti- cules qui sont produites dans les interactions électromagnétiques, faibles et fortes par des sources astrophysiques (Noyaux Actifs de Galaxies, restes de Supernovae, etc.). Ces rayons cosmiques « primaires » peuvent également interagir avec le milieu interstellaire ou intergalactique pour produire d’autres particules « secondaires ». L’étude de la production de rayons gamma et d’électrons d’énergie entre le GeV le TeV ainsi que la modélisation des processus d’émission et de propagation sont des sujets majeurs des expériences Cherenkov au sol et des missions spatiales. La production des photons aux très hautes énergies et la modélisation des processus d’émission ainsi que les mesures des spectres des électrons diffus ont été étudiées dans le cadre de thèses et ont donné lieu à plusieurs publications par le groupe H.E.S.S. du LPNHE.

D’autre part, les mesures du spectre en énergie des rayons cosmiques chargés montrent qu’il s’étend sur plusieurs décades en énergie et qu’il peut être représenté par une succession de lois de puissance. Les études aux énergies extrêmes de l’ordre de 109 – 1010 GeV contribuent à la fois à l’astrophysique et à la physique fondamentale. L’expérience Auger a fourni une réponse définitive sur la coupure (GZK) dans le spectre dû aux interactions des hadrons avec les photons du fond cosmologique (CMB). Ces résultats confirment l’absence de composante exotique (au delà du modèle standard) pour expliquer la forme du spectre. Le groupe Auger du LPNHE a fourni des contributions essentielles à l’étude des diverses composantes du rayonnement chargé extrême : protons, noyaux ou particules neutres (gamma et neutrinos).

Le domaine des Astroparticules contribue aux sujets fondamentaux de la Physique et de la Cosmologie tels que l’énigme de la composante invisible de l’Univers ou la structure de l’espace- temps à l’échelle de Planck.

Élucider la nature de la matière noire est l’un des plus grands défis de la recherche moderne. Les analyses du CMB par WMAP et PLANCK indiquent fortement que la matière noire est composée de particules massives interagissant faiblement (WIMP, Weakly Interacting Massive Particles) pour lesquelles le modèle standard de la physique des particules ne fournit pas de candidat satisfaisant. Au contraire, une théorie qui fait l’hypothèse de la supersymétrie (SUSY, symétrie entre les fermions et les bosons) donne lieu à des valeurs de densités reliques concordantes avec les mesures cosmologiques et propose d’excellents candidats pour les WIMP. La recherche de matière noire peut être « directe », lorsque l’on cherche à détecter l’interaction d’un WIMP avec
le milieu détecteur, ou « indirecte » lorsque l’on cherche à détecter les particules produites par
les interactions des WIMP entre eux ou avec d’autres particules. Ces deux méthodes sont complémentaires. La recherche directe est plus adaptée aux masses de WIMP inférieures à 100 GeV, alors que la recherche indirecte est plus sensible aux masses au delà de 100 GeV. Les télescopes Cherenkov au sol sont les seuls instruments à pouvoir détecter un WIMP dont la masse serait de l’ordre du TeV. Une part des activités du groupe H.E.S.S. du LPNHE concerne la recherche indirecte de matière noire. Le groupe a joué un rôle majeur dans la première publication scientifique de H.E.S.S.-II (réseau à cinq télescopes) sur ce sujet. D’autre part, depuis 2015, des activités de recherches directes ont démarré au laboratoire, avec les expériences XENON, DAMIC et DarkSide. En particulier, l’expérience XENON1T, actuellement en prise de données, a la meilleure sensibilité actuelle pour des masses de WIMP au-delà d’environ 10 GeV et a publié ses premiers résultats. En l’absence de détection avérée, les recherches directes et indirectes de matière noire (ainsi que les résultats du LHC) contribuent à contraindre les modèles proposés par la théorie.

La mesure des photons venant des sources astrophysiques lointaines ouvre des possibilités de sonder la structure microscopique de l’espace temps à l’échelle de Planck (10-35 m ou 1019 GeV), ouvrant ainsi une fenêtre observationnelle unique sur certains modèles de Gravité Quantique. En particulier, certaines approches théoriques font apparaître des relations de dispersions modifiées pour les photons dans le vide. Ceci se traduirait par des vitesses de propagation différentes pour des photons d’énergies différentes. Les études dites de « temps de vol » avec des photons énergétiques émis par des sources variables et lointaines tels que Noyaux Actifs des Galaxies, Sursauts Gamma et Pulsars, permettent déjà d’exclure toute une série de modèles de Gravité Quantique. Le groupe H.E.S.S. du LPNHE poursuit les études LIV (Lorentz Invariance Violation) avec les sources extragalactiques et les Pulsars détectés par H.E.S.S. et Fermi. Il a contribué à établir plusieurs des meilleures limites publiées ces dernières années.

L’équipe du LPNHE prépare également l’avenir de l’astronomie gamma au sol par sa participation au projet CTA (Cherenkov Telescope Array). Ce grand réseau, pourvu de centaines de télescopes, commencera à fonctionner à l’horizon 2020. Avec deux sites (un par hémisphère), CTA couvrira pratiquement tout le ciel. Sa surface effective importante, sa meilleure résolution et la vitesse de pointé des télescopes conduiront à l’augmentation de la sensibilité du détecteur d’un ordre
de grandeur par rapport aux expériences actuelles tout en élargissant le domaine d’énergie de
 10 GeV à 100 TeV. CTA permettra d’effectuer des études de populations des sources variables tels que les Pulsars, les Noyaux Actifs de Galaxies et les Sursauts Gamma, tout en ouvrant de nouvelles perspectives en astrophysique et en physique fondamentale. CTA sera aussi une expérience décisive dans les 50 ans qui viennent pour la détection indirecte de matière noire pour les énergies de 10 GeV à 100 TeV.

L’étude des rayons cosmiques est un domaine extrêmement riche. Les accélérateurs extrêmes dans l’Univers produisent des particules à des énergies inatteignables sur Terre. Les expériences qui étudient le rayonnement cosmique sont donc complémentaires à celles réalisées auprès des accélérateurs. Elles contribuent à apporter de nouvelles réponses aux questions fondamentales de la physique moderne.

Retrouvez ce texte dans le rapport d’activité 2015-2017 du LPNHE.

Collaborations : HESSAuger - CTA - DarkSideXENONDAMIC

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